Qui n’a jamais trouvé, en regardant un film, que certaines répliques semblaient bizarres, fausses, ou mal formulées ? L’écriture n’est jamais chose facile, et encore moins à l’écran. Nous donnons aujourd’hui quelques conseils pour écrire un bon dialogue dans un scénario.
L’utilisation du dialogue au cinéma
Rappelons tout d’abord qu’à la différence d’un roman ou d’une pièce de théâtre, au cinéma, c’est l’image qui prime — même si le son est important aussi. À l’époque du cinéma muet, la compréhension du scénario reposait sur les gestes et les expressions faciales des acteurs, ainsi que leur évolution dans le décor. Mais depuis l’apparition du son au cinéma, le dialogue est devenu l’une des choses auxquelles le spectateur va porter le plus d’attention. Il sert à donner un sens plus profond au jeu des acteurs et à développer l’action par l’intermédiaire des personnages qu’ils incarnent. Il est donc essentiel d’accorder de l’importance à l’écriture de ses dialogues.
Conseil n°1 : chaque dialogue a un but.
Nous venons de le voir, un dialogue a une utilité. De manière générale, il porte et supporte le jeu des acteurs, et de manière ponctuelle, il sert à faire avancer l’action. Gardez-vous donc d’écrire un dialogue pour « combler des minutes » ou « créer des pauses dans l’histoire » ! Le résultat donnera des échanges vides, creux, voire parfois ennuyeux.
Le dialogue donne une information qui produit ou développe des obstacles, rend compréhensibles des événements qui se sont passés ou qui vont se passer dans le film… Le dialogue doit donc rester clair. On notera cependant que les écarts tels que les pointes d’humour, les tirades panache… sont (très) appréciables, la vie n’est pas que données factuelles ! Pour ne citer que quelques exemples : Pulp Fiction et V pour Vendetta…
Conseil n°2 : ne pas se servir de ses protagonistes pour expliquer l’histoire.
Le dialogue donne une information, mais il ne doit pas pour autant trop en donner ! Pour pallier un oubli ou une incohérence scénaristique, la tentation est grande de fournir l’explication à travers un dialogue entre les personnages. Seulement celui-ci risque rapidement de s’étendre, et donc d’ennuyer le spectateur. Si vous devez tout expliquer par un dialogue, c’est qu’il y a quelque chose à revoir dans votre scénario. Exception faite peut-être des dialogues dits « de résolution », à la Hercule Poirot…
Mais prenez garde aux non-dits ! Certains éléments « obscurs » n’ont pas d’explication à la fin du scénario, mais ils donneront l’impression d’une maladresse scénaristique plutôt qu’un effet mystérieux. Rappelez-vous que ce qui est connu de vous ne l’est pas forcément pour le spectateur. Laissez-lui suffisamment d’indices pour qu’il puisse faire ses déductions lui-même.
Conseil n°3 : éviter le dialogue explicatif.
Petite nuance par rapport au conseil n°2, ici le terme « explicatif » fait référence à l’image que le dialogue accompagne. Les didascalies présentes dans le scénario seront visibles à l’écran, il n’est donc pas nécessaire de les retrouver dans le dialogue.
Exemple : Ben descend les escaliers à toute allure. Il rate la dernière marche et tombe. Il pousse un gémissement de douleur et se tient la cheville. Laura accourt, attirée par le bruit.
LAURA
Ben ! Oh mon dieu, ça va ? Tu t’es fait mal à la cheville ?
Par l’image, le spectateur a déjà compris que Ben s’était tordu la cheville. La réplique de Laura n’est pas pertinente. À la place, elle pourrait très bien déclencher une action :
LAURA
Ben ! Ça va ? Est-ce que tu peux te relever tout seul ?
Rappelez-vous : clarté et concision amènent mieux l’information.
Conseil n°4 : rester crédible et laisser parler les personnages.
Un conseil qui peut paraître évident, mais que l’on perd parfois un peu de vue. Pour que l’histoire soit crédible, les dialogues doivent être crédibles. Cela est possible quand les personnages sont travaillés, approfondis en amont. Un gangster ne va pas s’exprimer poliment, un enfant dira des mots simples et fera des phrases plus courtes… Il est aussi possible que ces personnages évoluent, et par conséquent leur manière de parler aussi. Ainsi, le gangster pourra s’adoucir par amour, et l’enfant devenu adolescent emploiera des mots plus complexes.
Mais comment laisser parler les personnages ? Si vous avez bien pris le temps de travailler vos personnages, vous devriez avoir une idée assez précise de leur manière de penser, de se comporter… et le dialogue s’écrira naturellement. Evitez les considérations philosophiques et les belles lettres (sauf si vos personnages sont de haute naissance, vivent à une autre époque…). Un dialogue de scénario est fait pour être parlé et entendu, pas lu. Il faut également prendre en considération l’état dans lequel se trouve le personnage (calme ou agité, triste ou heureux…) pour écrire une réplique qui semblera naturelle. Par exemple, un adolescent pris d’accès de colère ne dira jamais « Tu m’exaspères ! »
Petite astuce bonus : lisez vos dialogues à haute voix (ou faites-les lire par d’autres si vous ne vous sentez pas l’âme d’un acteur), c’est la meilleure manière de se rendre compte si les échanges sonnent « faux » ou si l’enchaînement n’est pas naturel. Un dialogue de scénario a un rythme, celui du langage oral.
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