Créer du conflit dans son scénario

Créer du conflit dans son scénario

Un scénario se construit autour d’un problème qui amène tensions et situations de conflit. Mais comment créer et développer un conflit solide dans son scénario ? LightyShare vous donne quelques conseils d’écriture !

Via la très intéressante chaîne de Tyler Mowery (en anglais) sur Youtube.

Le processus pour créer du conflit commence bien avant l’écriture du scénario

Revenons tout d’abord aux fondements. Votre film raconte une histoire. Contrairement à ce que l’on aurait tendance à penser, cette histoire ne parle PAS d’un concept. Pour reprendre l’exemple de la vidéo, Inception n’est pas une histoire d’implantation d’idées dans l’inconscient. Le film raconte l’histoire d’un père de famille qui est prêt à tout pour retourner auprès de sa famille — de ses enfants. L’histoire de votre film, c’est donc l’histoire de personnages qui se débrouillent tant bien que mal pour tracer leur chemin dans la vie. Un film parle d’amour, de passion, de dépression, de vengeance… Comme chacun d’entre nous, chaque personnage est mû par des valeurs et des croyances. Ce sont précisément ces valeurs ou croyances qui vont servir à créer un conflit entre les différents protagonistes.

Mais comment bien amener les divergences d’opinions des personnages dans le scénario ? Commencez déjà par vous focaliser sur les personnages. Comme pour l’écriture des dialogues, il est impératif d’avoir développé ses personnages en amont. Quels sont leurs goûts, leurs intérêts, leurs valeurs… Prenez votre personnage principal (en général, l’attention est portée sur un seul protagoniste) et développez-le. Puis prenez les personnages secondaires. Leurs propres valeurs et croyances vont potentiellement différer de celles du personnage principal : c’est la source de conflit.

Exemple : Batman et le Joker. Comme expliqué dans la vidéo, Batman croit en la loi, la justice et la morale. Le Joker rejette quant à lui le système judiciaire et législatif. Pour lui, l’humanité est proche de sa ruine et se voile la face en se cachant derrière ces systèmes.

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Créer une tension constante pour maintenir le conflit tout au long du film

Une fois que les personnages sont dressés dans toute leur complexité et que leurs relations sont établies, une autre question se pose. Comment cultiver la tension (et l’attention) de manière à garder un intérêt constant pour le conflit ?

La réponse est : le développement du personnage. Au début de chaque intrigue, le personnage principal dans sa condition initiale ne peut pas contrer la force antagoniste qui s’oppose à lui. Il doit faire face à de petits challenges (dans un récit, on appelle cela les péripéties) qui lui permettront d’évoluer avant de se mesurer au principal antagoniste. Le personnage principal doit d’abord faillir, ce qui le pousse dans ses retranchements. Il ne pourra atteindre son but qu’en repoussant ses limites, et parfois au prix de sacrifices. Par exemple, dans la saga The Hunger Games, Katniss sort victorieuse de son combat contre le Capitole mais assiste, impuissante, à la mort de sa petite soeur Primerose.

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Le personnage évolue au cours du récit en fonction des challenges auxquels il est confronté. La psychologie du personnage change, au point parfois de remettre en question ses valeurs et croyances, qui le définissaient au début.

Exemple : The Truman Show. Le personnage principal, Truman Burbank, pense qu’il vit « dans la vraie vie », avant de découvrir que son monde n’est qu’une gigantesque mise en scène. Ses croyances sont mises à mal, et ses découvertes vont redéfinir sa personne. Auparavant insouciant et heureux, il devient ensuite momentanément nerveux et paranoïaque, puis téméraire et déterminé à découvrir le monde extérieur.

Une série d’objectifs mineurs à la difficulté croissante

Robert McKee, professeur d’écriture créative, parle de « complications progressives ». Selon lui, l’intrigue doit consister en une série de challenges à la complexité croissante, jusqu’à atteindre une apothéose que le spectateur ne puisse imaginer autre que telle. Robert McKee définit ces péripéties comme des objectifs mineurs (scene-objective) à atteindre, ils durent le temps d’une séquence. Selon Robert McKee, ces objectifs mineurs doivent êtres indiqués au début de la scène. Ils sont cependant à distinguer de l’objectif principal (super-objective) du film. En outre, les challenges qui se présentent au personnage principal doivent le pousser toujours plus dans ses retranchements, l’amener à dépasser ses limites. Acculé, il ne peut plus faire marche arrière et doit donc se surpasser pour s’en sortir. Chaque péripétie provoque ainsi un pic de tension qui permet de faire vivre le récit.

Exemple : le Seigneur des Anneaux. Le personnage principal est Frodon. Son objectif principal est de détruire l’Anneau Unique en le jetant dans un cratère situé dans le Mordor, la contrée de l’antagoniste. Tout au long du récit, des péripéties d’ordre croissant les poussent lui et ses amis dans leurs retranchements. L’avenir de leur monde est en jeu, ils ne peuvent pas reculer. La tension monte ainsi de manière constante jusqu’à atteindre l’apothéose où Frodon, Sam et Gollum se disputent au bord du précipice et de la lave en fusion, tandis que leurs amis livrent une bataille aussi désespérée qu’acharnée contre les Orcs de Sauron.

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On résume :

  • La complexité des personnages, étudiée en amont de l’écriture du scénario, permet de fournir les bases du conflit
  • Le conflit prend sa source des divergences entre les valeurs fondamentales des différents personnages
  • Le conflit et la tension se maintiennent par des péripéties à la difficulté croissante, qui permettent de faire évoluer le personnage principal

Et voilà, vous êtes maintenant parés pour écrire (entre autres) de véritables thrillers, à l’intrigue aussi complexe que captivante !


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4 conseils pour écrire un bon dialogue dans un scénario

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Qui n’a jamais trouvé, en regardant un film, que certaines répliques semblaient bizarres, fausses, ou mal formulées ? L’écriture n’est jamais chose facile, et encore moins à l’écran. Nous donnons aujourd’hui quelques conseils pour écrire un bon dialogue dans un scénario.

L’utilisation du dialogue au cinéma

Rappelons tout d’abord qu’à la différence d’un roman ou d’une pièce de théâtre, au cinéma, c’est l’image qui prime — même si le son est important aussi. À l’époque du cinéma muet, la compréhension du scénario reposait sur les gestes et les expressions faciales des acteurs, ainsi que leur évolution dans le décor. Mais depuis l’apparition du son au cinéma, le dialogue est devenu l’une des choses auxquelles le spectateur va porter le plus d’attention. Il sert à donner un sens plus profond au jeu des acteurs et à développer l’action par l’intermédiaire des personnages qu’ils incarnent. Il est donc essentiel d’accorder de l’importance à l’écriture de ses dialogues.

Conseil n°1 : chaque dialogue a un but.

Nous venons de le voir, un dialogue a une utilité. De manière générale, il porte et supporte le jeu des acteurs, et de manière ponctuelle, il sert à faire avancer l’action. Gardez-vous donc d’écrire un dialogue pour « combler des minutes » ou « créer des pauses dans l’histoire » ! Le résultat donnera des échanges vides, creux, voire parfois ennuyeux.

Le dialogue donne une information qui produit ou développe des obstacles, rend compréhensibles des événements qui se sont passés ou qui vont se passer dans le film… Le dialogue doit donc rester clair. On notera cependant que les écarts tels que les pointes d’humour, les tirades panache… sont (très) appréciables, la vie n’est pas que données factuelles ! Pour ne citer que quelques exemples : Pulp Fiction et V pour Vendetta

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Conseil n°2 : ne pas se servir de ses protagonistes pour expliquer l’histoire.

Le dialogue donne une information, mais il ne doit pas pour autant trop en donner ! Pour pallier un oubli ou une incohérence scénaristique, la tentation est grande de fournir l’explication à travers un dialogue entre les personnages. Seulement celui-ci risque rapidement de s’étendre, et donc d’ennuyer le spectateur. Si vous devez tout expliquer par un dialogue, c’est qu’il y a quelque chose à revoir dans votre scénario. Exception faite peut-être des dialogues dits « de résolution », à la Hercule Poirot…

Mais prenez garde aux non-dits ! Certains éléments « obscurs » n’ont pas d’explication à la fin du scénario, mais ils donneront l’impression d’une maladresse scénaristique plutôt qu’un effet mystérieux. Rappelez-vous que ce qui est connu de vous ne l’est pas forcément pour le spectateur. Laissez-lui suffisamment d’indices pour qu’il puisse faire ses déductions lui-même.

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Conseil n°3 : éviter le dialogue explicatif.

Petite nuance par rapport au conseil n°2, ici le terme « explicatif » fait référence à l’image que le dialogue accompagne. Les didascalies présentes dans le scénario seront visibles à l’écran, il n’est donc pas nécessaire de les retrouver dans le dialogue.

Exemple : Ben descend les escaliers à toute allure. Il rate la dernière marche et tombe. Il pousse un gémissement de douleur et se tient la cheville. Laura accourt, attirée par le bruit.

LAURA
Ben ! Oh mon dieu, ça va ? Tu t’es fait mal à la cheville ?

Par l’image, le spectateur a déjà compris que Ben s’était tordu la cheville. La réplique de Laura n’est pas pertinente. À la place, elle pourrait très bien déclencher une action :

LAURA
Ben ! Ça va ? Est-ce que tu peux te relever tout seul ?

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Rappelez-vous : clarté et concision amènent mieux l’information.

Conseil n°4 : rester crédible et laisser parler les personnages.

Un conseil qui peut paraître évident, mais que l’on perd parfois un peu de vue. Pour que l’histoire soit crédible, les dialogues doivent être crédibles. Cela est possible quand les personnages sont travaillés, approfondis en amont. Un gangster ne va pas s’exprimer poliment, un enfant dira des mots simples et fera des phrases plus courtes… Il est aussi possible que ces personnages évoluent, et par conséquent leur manière de parler aussi. Ainsi, le gangster pourra s’adoucir par amour, et l’enfant devenu adolescent emploiera des mots plus complexes.

Mais comment laisser parler les personnages ? Si vous avez bien pris le temps de travailler vos personnages, vous devriez avoir une idée assez précise de leur manière de penser, de se comporter… et le dialogue s’écrira naturellement. Evitez les considérations philosophiques et les belles lettres (sauf si vos personnages sont de haute naissance, vivent à une autre époque…). Un dialogue de scénario est fait pour être parlé et entendu, pas lu. Il faut également prendre en considération l’état dans lequel se trouve le personnage (calme ou agité, triste ou heureux…) pour écrire une réplique qui semblera naturelle. Par exemple, un adolescent pris d’accès de colère ne dira jamais « Tu m’exaspères ! »

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Petite astuce bonus : lisez vos dialogues à haute voix (ou faites-les lire par d’autres si vous ne vous sentez pas l’âme d’un acteur), c’est la meilleure manière de se rendre compte si les échanges sonnent « faux » ou si l’enchaînement n’est pas naturel. Un dialogue de scénario a un rythme, celui du langage oral.


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